Gastronomie québécoise
En amateur de bonne bouffe, parlons un peu de la gastronomie d'ici.
Si on s'intéresse à la gastronomie du Québec, on devrait plutôt parler
d'archéogastronomie, car aujourd'hui il n'en reste que quelques traces, à part
les produits dérivés du sirop d'érable et la poutine (si on considère ça comme
un plat) qui restent courant. La culture américaine a largement pris le dessus.
Je trouve que comparativement à la France, il n'est pas rare de manger dans des
resto (hors fast-food) des trucs sans goût, aseptisés, fades… En fait, après 5 mois ici, j'ai
remarqué que les québécois, et je pense que c'est généralisable à tout le Canada
et l'Amérique du Nord, accordent beaucoup moins d'importance aux repas, à la
qualité de la nourriture et au plaisir de manger. Les « repas » sont souvent
expédiés et pris sur le pouce d'ailleurs, pas question de s'éterniser à table
comme on a l'habitude en France. Ils mangent presque par contrainte, juste pour
satisfaire leur faim. Ou plutôt leur envie de manger, car d'un autre coté je
vois régulièrement des gens obèses, dans le sens vraiment maladif.
Mais Montréal abrite pourtant des milliers de restaurants qui représentent à peu près toutes les cuisines du monde (Montréal est une ville extrêmement cosmopolite). J'ai lu souvent dans les guides touristiques que Montréal est une destination de choix pour quelqu'un qui veut gouter à la gastronomie de différent pays. Mais même si les plats sont cuisinés effectivement avec le savoir faire du pays d'origine, les ingrédients eux sont (au moins en partie) ce qu'on trouve sur le continent américains, et j'ai du mal à croire qu'une choucroute ou une pizza ici soit aussi bonne qu'en Allemagne ou qu'en Italie.
Mais bref, on trouve donc à Montréal une très grande quantité de restaurants qui reprennent la gastronomie de différents pays, sauf… celle du Canada, en particulier du Québec ! Et forcement, si elle est déjà peu cuisinée ici, en dehors du Canada elle est quasiment méconnue. Donc pour y gouter, il faut souvent cuisiner les plats soit-même.
Le blog d'À Boire et À Manger en parle à peine malheureusement (voir pas du tout malgré les 4 épisodes), donc je vais vous en parler moi, mais sans dessins…
Malgré qu'elle soit très peu connue, je trouve que la gastronomie québécoise vaut quand même le
détour. Elle est assez particulière dans le sens où les associations sont
souvent surprenantes et inhabituelles. C'est à l'opposé de la fine cuisine, les
plats sont généralement simples, sans raffinements, copieux et bien caloriques. Tout tourne
autour de la viande ou de la charcuterie.
La raison est que, premièrement, les pionniers de la Nouvelle France
(je ferrai peut-être un article sur l'histoire de la Nouvelle France, c'est
assez intéressant, et encore une fois complètement méconnu, je ne me souviens
même pas ne serait-ce que l'avoir entrevue en cours d'histoire à l'école)
étaient généralement assez pauvres (paysans ou ouvriers) et n'avaient pas une
très grande variété d'aliments à leur portée. Mais ils bénéficiez quand même de
beaucoup de produits importés grâce au commerce maritime entre la Nouvelle
France, les Antilles et la France, ou encore entre la Nouvelle France et la
Martinique. D'où la présence de sucre, de mélasse (résidu de raffinage de la canne ou
betterave à sucre, bien moins cher que le sucre à l'époque), de rhum depuis les
Antilles ou de vin et de sel depuis la France, dans leur cuisine.
L'omniprésence de viande s'explique par l'abondance de gibier et la liberté de
chasse (dans le sens pas contrôlée par un seigneur comme en France). Le climat
et le travail était difficile, donc il fallait quelque chose de très calorique.
Parmi les plus connues, et le top du top pour moi, on trouve donc les fèves au lard, appelées aussi bines, de l'anglais bean (haricot/fève) qui ne sont donc pas des fèves mais des haricots blanc (même si à l'époque c'était des gourganes appelées aussi fèves des marais, si vous suivez toujours), qu'il faut faire cuire au four pendant une dizaine d'heures à basse température, avec beaucoup de lard, de la mélasse, du coulis de tomate et des épices comme du gingembre et de la moutarde. Ça donne des haricots fondant et bien imprégné du gras du lard, vraiment très bon mais à manger avec des pommes de terre ou du pain, sinon seul c'est vraiment très gras.
Connu surtout pour les controverses quand à son origine et sa facilité de préparation, il y a le pâté chinois, qui consiste en un gratin composé d'une couche de viande hachée, une couche de maïs en grains ou en crème (aussi appelé blé d'Inde) et une couche de purée de pomme de terre. Certains affirment que ce nom a été donné car le plat était consommé quotidiennement par les ouvriers chinois lors de la construction de la ligne ferroviaire pancanadienne, d'autres pensent que ça n'a rien à voir avec les chinois, et que son origine viendrait de la traduction de china pie, une spécialité locale de la ville de South China, dans l'état du Maine. Il y a d'autres théories, mais en résumé on a perdu son origine.
Autre plat typique, pour lequel presque chaque région a sa variante, la tourtière à la viande. Au Sagenay-Lac-Saint-Jean, il s'agit de la tourtière du Lac-Saint-Jean, en Gaspésie de la cipaille, etc… chacune est à priori différente, mais le plat consiste en une couche de pâte, de la viande, hachée ou en petits cubes, de gibier, de bœuf ou de porc, éventuellement marinée, des épices, éventuellement des pommes de terre en cubes, et une seconde couche de pâte pour fermer hermétiquement. Le tout cuit au four à basse température. On peut aussi rajouter des légumes (carottes, navets…) ou remplacer la viande par de la morue, ou encore du saumon. Bref, plein de variantes existent. C'est pas très compliquer à faire, mais on en trouve assez facilement des toutes prêtes dans des boucheries ou boulangeries.
Et puis plein d'autres encore à base de viande toujours : ragout de boulettes de viande, pain de viande, bouillons et ragoût en tout genre etc…
En charcuterie, ils ont moins de chose qu'en France, mais on trouve le fameux cretons, qui peut se comparer avec de la rillettes (d'ailleurs tous les 2 ne s'écrivent qu'au pluriel !) mais fait généralement avec de la viande de porc grasse, plus éventuellement du beurre (pour faire encore plus gras). C'est un plat qui était surtout mangé au petit-déjeuner sur du pain, comme les fèves au lard. On retrouve sinon plein de pâtés (de gibier, de tête, à la bière, etc…), du jambon fumé effiloché, qui est en fait un jambon cuit (blanc) puis fumé dans lequel on prélève non pas des tranches mais des lanières de viande, etc…
Outre tout ce gras, les colons faisaient quand même une très grande consommation de soupe à base de légumes d'hiver qu'ils cultivaient (genre carottes, pommes de terre, navets, courges, betterave etc…). Soupe dans laquelle ils pouvaient rajouter, aller pour changer… un peu de viande ! C'est peut-être la seule chose qui reste autant consommée aujourd'hui, quasiment n'importe quel fastfood, boulangerie etc… qui propose des plats à emporter propose des soupes (mais il ne faut pas s'attendre à un truc exceptionnel niveau goût).
Au niveau sucré, on trouve bien sûr toute sorte de produits de l'érable, allant de l'eau d'érable (aucune transformation) jusqu'au beurre et sucre d'érable, avec la fameuse tire d'érable dans les cabanes à sucre au printemps. Idem pour ce qui est des canneberges et des bleuets (variété de grosses myrtilles), disponible sous pleins de formes différentes : fraiches, en jus, dans des tartes, etc…
En dessert, le plus consommé encore aujourd'hui est le pouding-chômeur fait, encore une fois, avec des ingrédients bon marché : farine, beurre, œuf, lait et sirop de cassonade.
D'origine bien plus plus récente, les populaires beavertails (ou queues de castor) vendues dans des camions ambulants, lors des fêtes foraines et autres animations, sont des pâtisseries faites d'une sorte de pâte à gaufre mise en forme de queue de castor, puis frittes dans l'huile et recouvertes de diverses garnitures. J'imaginais ça bien bourratif, mais en fait pas du tout.
Le Québec fait une très grande production de pomme, principalement au début de l'automne, et est donc un gros producteur de cidre et cidre de glace. Le cidre de glace est fait à partir de jus de pomme concentré par l'action du froid (le jus est stocké dehors à une température largement négative, l'eau qui a formé des cristaux de glace est ainsi retirée au fur et à mesure. Ça permet d'obtenir un cidre plus sucré et alcoolisé, plus ou moins équivalent au vin.
D'origine plus récente, On trouve aussi plusieurs spécificités plus régionales, comme la viande fumée ou les bagels à Montréal, les microbrasseries artisanales un peu partout, les produits de la mer en Gaspésie, etc…
Les trucs chiants (cette fois-ci)
Les unités de mesure… un sujet classique mais je ne me serais jamais douté que
c'était autant une prise de tête !
Tout d'abord il y a ceux qui parlent en pouces. Ça c'est simple. Ensuite ceux
qui parlent en pieds, mais comme ça ne tombe pas rond, soit parlent ensuite en
pouces, soit en fraction de pied. Tout en sachant qu'un pied n'équivaux évidemment
pas à un nombre entier de pouces.
Pour illustrer la situation, pour une rallonge électrique de même taille on peut
voir noter sur l'étiquette : 3 m, 9' 10", 118", 9,84' ou encore 9' 4/5'.
Et ils aime ça les fractions de pouce pour remplacer les millimètres, ils les utilisent partout. J'ai acheté par exemple une boite de tournevis de précision, dans lequel j'ai des tournevis de 3/32", 5/64" et 1/16". Exercice : classez les du plus petit au plus grand[1]. Bon oui, après avoir réfléchit un peu et avec l'habitude ça vient plus facilement, n'empêche que c'est bien moins simple que si ils avaient utilisé des millipouces (ou des poils de jambe pour continuer dans le délire). Je n'avais lu nul part qu'il fallait réviser ses cours de math avant de venir au Québec ! Car si je veux savoir combien fait 4mm en pouce, diviser 4mm par 2,54 ne m'avancera pas beaucoup avec une bête calculette, je n'aurai pas la fraction la plus proche… Un de mes meilleurs investissements est donc un mètre ruban, gradué à la fois en mètres, pouces et pieds, en un coup d'œil je trouve la bonne fraction.
Et puis, ces histoires de pouces, ça peut devenir dangereux. Un dialogue qui aurait pu arriver chez le coiffeur :
− Et pis, combien tu veux-tu que je t'enlève de pouces?
− Euh, ne touche pas a mes pouces, coupe moi juste mes cheveux, ce sera suffisant!
[1] Réponse : et bien ils sont déjà classés, ils ne sont pas sadiques au point de ranger les tournevis dans le désordre !